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Soustons la grande histoire

L’évacuation dans les Landes

Le 1er septembre 1939, l’armée allemande franchit la frontière polonaise. Cette agression sans déclaration de guerre marque le début de la Seconde Guerre mondiale. L’état-major de l’armée française ordonne le jour même l’évacuation des populations, du Rhin à la ligne Maginot, selon un plan établi en 1938 et qui concerne plus de 300 000 personnes.

Les mairies ouvrent les enveloppes renfermant le protocole d’évacuation. Les gardes champêtres sonnent les cloches du rassemblement. Les habitants n’ont alors que 3 heures pour partir, avec pour consigne de tout abandonner: maisons, bêtes… Ils n’ont donc guère plus qu’une valise chacun en arrivant à Altkirch, où les attendent des trains à bestiaux qui doivent les emmener loin de la guerre menaçante.

Quelques-uns restent à quai, désignés pour constituer les commissions de sauvegarde qui ont à charge de surveiller chaque village déserté.

De contrôles en ravitaillements, l’interminable migration ferroviaire s’arrête le 5 octobre en gare de Grenade-sur-l’Adour, dans les Landes; des Juifs ont été pendant le trajet sortis des wagons…

Sur place, les maires landais n’ont pas été informés de l’arrivée des Alsaciens qu’ils sont tenus d’accueillir et d’héberger ! Chaque village s’attache cependant à reloger chacun, parfois dans des granges, à fournir des couvertures, de la nourriture… Et de manière générale à partager ses biens. Les familles hôtes reçoivent de l’État 10 anciens francs par adulte et par jour, 6 par enfant ; soit bien souvent davantage que leurs propres revenus.

La méfiance envers les Alsaciens prévaut d’abord, des « boches » puisque parlant allemand ! Très vite scolarisés grâce à l’ouverture de nouvelles classes, les jeunes traduisent ainsi les propos des plus anciens, qui peuvent eux-mêmes apprendre le français en cours du soir. Hommes ou femmes, les adultes aident de leur côté au labeur dans les fermes.

Evacuation dans les Landes

Le temps des échanges

L’adaptation s’avère difficile pour les Alsaciens. Tout d’abord parce que les familles sont éclatées entre différents villages. Ensuite en raison d’un confort précaire, sans l’eau courante, le chauffage ou l’électricité qu’ils avaient pour la plupart en Alsace. Souvent ici, seule la cheminée permet de cuire et demande du coup à maîtriser l’utilisation du chaudron.

Les échanges se développent toutefois assez vite, souvent autour des spécialités culinaires ou de l’agriculture, et avec des découvertes réciproques : la choucroute, la tête de veau, la charcuterie, les abats, la culture de la patate, de la tomate, du liège ou des résineux. La culture de la langue y contribue aussi, avec une mémoire toute sélective pour les chansons… et les jurons ! Les Alsaciens se passionnent même pour les courses de vachettes.

Alsaciens, Landaises. Landais, Alsaciennes. Des couples se forment. Des enfants naissent…

10 mai 1940. Les Allemands violent la neutralité des Pays- Bas, prennent la Belgique et avancent vers Paris. Cette percée annonce la défaite des forces armées françaises et la signature de l’armistice, le 22 juin, par le gouvernement Pétain. Le territoire est alors divisé en trois zones: la zone occupée, la zone annexée et au sud, la zone libre.

Soustonnais/ses sur une plage des Landes

Le retour en zone occupée

Ces événements signent le retour des évacués en Alsace. Sous chaque toit, le départ est pénible, avec toujours la promesse de se revoir, chacun considérant l’autre comme l’un des siens, un véritable membre de la famille.

Les wagons à bestiaux reviennent en Alsace le 1er septembre 1940.

La nouvelle vie en zone occupée est plus rude encore. Certaines maisons sont détruites. Partout les meubles ont été volés, ou détruits pour servir de bois de chauffage. Sans boulangerie ni épicerie, les villages sont à réorganiser. Et il faut surtout devenir Allemand, c’est-à- dire parler le Hochdeutsch – la langue française est proscrite, y compris en posséder des écrits –, changer son prénom, rebaptiser les rues… Enfin, l’armée allemande enrôle de force les jeunes, les « malgré-nous »…

Jamais pourtant la parenthèse landaise ne se referme. Après le temps des correspondances vient celui des retrouvailles entre familles, vers 1950. Puis de la première visite des Landais en Alsace, en convoi escorté par les gendarmes, sur des routes fermées, envahies par la population venue les saluer. À l’instar de Soustons et Huningue, les jumelages entre communes landaises et alsaciennes scellent ces liens indéfectibles, entretenus depuis par des échanges réguliers entre familles, clubs sportifs ou écoles…

Et qu’importe si plus de mille kilomètres séparent le square Soustons de l’avenue de Huningue, et que le Rhin ne coule pas encore vers l’Atlantique !

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